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L’ordre
des mets dans les repas chinois par William Chan Tat Chuen Juin 2015 Je
revois encore cette scène avec l’étonnement de ma voisine française lors
d’un vol opéré par la compagnie Air France entre Pékin et Paris. C’était
le service du déjeuner. Pendant que nous consommions notre plateau repas à la
française dans l’ordre successif de l’entrée, du plat, du fromage et du
dessert, notre voisin chinois, situé juste au rang d’en face, alternait
joyeusement ses bouchées entre l’entrée, le plat, le fromage et le dessert.
Il avait à sa main droite la fourchette pour prendre les morceaux dans les
barquettes, et à sa main gauche le pain qu’il croquait entre deux bouchées.
Notre passager chinois avait projeté tout simplement son mode de consommation
sur un repas français ! Ainsi, en observant l’ordre de consommer les
mets d’un pays à l’autre, on constate qu’ils ne sont ni naturels, ni
universels. Ils sont le résultat d’une culture et évoluent dans le temps.
Devant le développement croissant des touristes chinois en France, les
restaurateurs, s’ils souhaitent capter l’attention et les papilles de ces
derniers, doivent saisir le sens culturel de ce que manger signifie pour un
Chinois. Le
repas chinois est basé sur un équilibre nutritionnel entre un féculent de
base appelé zhushi (nourriture
principale) et des plats d’accompagnement appelés fushi
(nourriture secondaire). C’est le zhushi,
composé à majorité de céréales cuisinées de manière neutre qui composent
le bol alimentaire. Les fushi, cuisinés
à partir de produits carnés, de poissons, de végétaux, apportent la saveur
pour compenser la fadeur des céréales. Dans un repas du quotidien, la
nourriture principale, appelée aussi en chinois fan
(riz), constitue au moins 80% de la ration alimentaire, tandis que les plats
d’accompagnement, appelés aussi en chinois cai
(plats), constituent les 20% restants. Ce trait fondamental de la culture
culinaire et alimentaire chinoise est l’héritage d’une civilisation agraire
ancienne fondée sur la céréaliculture. Dès l’Antiquité, ce sont les céréales
en « grains entiers » (millet au nord, riz au sud) cuisinées dans
un milieu humide, à la vapeur ou à l’eau, qui constituent la partie
substantielle du repas et entretiennent le principe vital de chacun. Toutes les
classes sociales, de l’empereur au simple particulier, se conformaient à ce
modèle alimentaire. Confucius lui-même déclarait que son volume de céréales
consommé à chaque repas était largement supérieur à ses sapides
accompagnements, quand bien même il avait les moyens nécessaires de s’en
procurer davantage. Cette exigence répond à la fois à une vision diététique
et morale de l’art de manger. Cette sagesse de Confucius n’est pas suivie
par certaines nouvelles classes aisées enrichies par le développement économique
de ces dernières années. Leur nouveau pouvoir d’achat leur permet de
consommer plus de plats d’accompagnement comme une revanche sur le passé où
elles se sentaient privées. Malgré tout, ce système alimentaire du repas basé
sur l’opposition entre fan et cai reste encore le
modèle dominant. Comme par le passé, le pourcentage entre fan
et cai s’inverse pour les repas de fête et les banquets car c’est
le temps des réjouissances et de la bombance. Les plats d’accompagnements
prennent le dessus sur les féculents de base. Il est même impoli d’en
consommer sous peine de faire perdre la face à l’amphitryon ! Au-delà
de la composition du repas, les Chinois partagent des points communs avec les
Français dans l’acte de manger : c’est d’abord du plaisir avec le
primat du goût, c’est ensuite le partage et la convivialité, c’est enfin
l’observance des règles de tables dans les relations sociales. L’autre
point important pour les Chinois et moins prégnant en France, c’est
l’aspect diététique de la nourriture pour entretenir son principe vital.
Dans une tradition médicale qui utilise beaucoup d’ingrédients culinaires du
quotidien pour soigner, la frontière entre aliment et médicament est mince. Le
repas quotidien et ordinaire des Chinois est composé d’une base majoritaire
de féculent, consistant en du riz nature en grain, des nouilles de riz, des
nouilles de blé, des petits pains vapeur (mantou)
avec au moins deux plats d’accompagnement, suivis d’une soupe. Ces plats
peuvent être de simples légumes sautés, des plats à base de produits
carnés, de poissons, d’abats, de tofu (fromage de soja). Ils sont assaisonnés
avec de la sauce de soja, de l’ail, du vinaigre ou encore du piment ou des épices
aux cinq parfums. Leur qualité et leur variété dépend du statut économique
de la famille. Dans la cuisine, le matériel pour cuisiner le féculent de base
et les plats sapides est distinct. La marmite utilisée pour faire cuire le riz
ne sera réservée qu’à cet usage. Le
rôle de la soupe tient lieu de boisson pendant le repas. La plupart du temps,
il s’agit juste de quelques végétaux émincés, revenus dans de l’huile
avec du gingembre haché, puis mouillés à l’eau. Au moment du repas, tous
les plats cuisinés et la soupe sont disposés au centre de la table tandis que
le féculent de base est servi dans des bols individuels. Il n’y a pas
d’ordre de consommation des mets. Chacun pioche selon ses envies dans les
plats cuisinés collectifs pour accompagner son riz nature ou ses nouilles. On
peut se resservir d’autant de fois de riz ou de nouille qu’on le désire.
Pour formuler sa satisfaction sur l’appréciation d’un repas, le Chinois ne
vous dira pas que vos plats cuisinés sont succulents. Il vous dira qu’il a déjà
consommé trois bols de riz ! Un plat raté n’encourage pas le mangeur à
se resservir en céréales ! C’est toujours « la céréale »
qui sert de curseur de mesure à la satiété et à la gourmandise. La soupe est
généralement bue en fin de repas car selon la médecine chinoise, elle améliore
et aide à la digestion. Mais rien ne vous empêche de l’apprécier dès le début
du repas. Son absence peut être remplacée par un thé, ou à défaut, d’eau
chaude. Comme en France, les Chinois consomment trois repas par jour avec le
petit-déjeuner, le déjeuner et le dîner. La composition des repas pour ces
trois services est similaire. Les céréales prennent toujours la première
place. Au petit déjeuner, le riz est préparé avec plus d’eau sous forme de
bouillie ; les nouilles et les pains vapeurs sont aussi présents et
accompagnent des mets comme les œufs salés, les légumes saumurés ou les
reliefs des plats de la veille. Le thé ou le lait de soja sont les principales
boissons. En dehors des heures de repas principaux, chacun peut se faire plaisir
avec un en-cas acheté dans la cuisine de rue. Sur
les vols d’Air China, même si le service des repas servis en Première classe
Pavillon Interdit et en classe affaires Pavillon Impérial suivent les séquences
de la concurrence, avec un apéritif au champagne accompagné de petites bouchées
gourmandes, la partie centrale du repas avant le service du dessert est
typiquement chinois. Le passager de cette classe Elite se voit servir en même
temps un bol de riz parfumé, avec un assortiment de plats cuisinés. Comme à
la maison, le riz n’est jamais disposé dans la même vaisselle que les plats
sapides, et le passager déguste son repas dans l’ordre qui lui convient,
accompagné de vins fins ou d’un thé prestige. On retrouve bien
l’opposition céréales et plats cuisinés du régime alimentaire chinois.
Comparé aux repas des classes business servis par Air France, il n’y a pas
d’entrée ni de fromage. Par contre, un petit pain croustillant et du beurre
en forme de fleur sont bien servis. Ces deux ingrédients commencent à pénétrer
dans les nouvelles habitudes alimentaires des chinois, surtout au petit-déjeuner,
dans les grandes villes. A l’exposition
universelle de Milan 2015, l’importance des céréales dans la nourriture
chinoise est aussi évoquée. La structure du pavillon Chine rappelle les vagues
d’un champ de blé ondoyant. Son « champ de l’espoir » à
l’entrée du pavillon est constitué de 20 000 brindilles de blé
artificielles à base de leds ! Un
timbre est même édité par la poste chinoise pour l’occasion avec le visuel
d’un bol de riz et d’un épi de céréale. Les
cartes des restaurants en Chine reflètent aussi cette ligne de pensée. Il y a
toujours la rubrique féculent de base, implicitement neutre et sans
assaisonnement avec le riz, les nouilles et les pains vapeur. Il y a ensuite
tous les plats sapides classés en majorité par mode de cuisson (soupes, sautés,
rôtis, fritures, vapeur, mijotés…) et parfois par famille de produit
(volailles, produits d’eaux, porc, tofu, légumes, mets sucrés…). Il y a
surtout les plats-signatures qui font la réputation du lieu et pour lesquelles
on fréquente le restaurant. Dès que les féculents de base comme le riz ou les
nouilles sont associés et cuisinés avec des produits carnés et des végétaux,
mis en goût avec juste de la sauce d’huître et de l’huile de sésame ou un
bouillon, ils perdent leur identité de féculent de base et basculent dans les
catégories des plats cuisinés. Lorsqu’une recette regroupe à la fois une
partie de féculent de base et des ingrédients sapides comme les raviolis, les
petits pains vapeur farcis, les crêpes de riz vapeur farcies, les petits
feuilletés au porc laqué, les buns à la crème de lotus sucrée… elle prend
l’appellation de xiaochi (petite nourriture). Les
petites nourritures peuvent être consommés seules, comme à Canton accompagnées
d’une tasse de thé ou entrent dans la séquence d’un début de repas. Dans
un repas improvisé au restaurant en famille ou avec des amis en Chine,
l’ordre des mets n’a aucune importance, mais le partage des plats reste une
nécessité culturelle. Généralement, c’est celui ou celle qui invite qui décide
de la composition du menu, de l’ordre de consommation de mets selon son bon
plaisir. Par contre, la conception d’un menu de banquet pour les fêtes
saisonnières ou familiales ne s’improvise pas et répond à des règles précises.
Au-delà du banquet, c’est l’image, la position sociale et la « face »
(la réputation) des invitants qui sont aussi en jeu ! En général, ces
derniers confient leur destin aux professionnels de la restauration avec un
budget fixé à l’avance. Ils proposent alors le nombre de plats par service,
planifient la succession de leurs entrées en scène, prévoient la taille de
chaque vaisselle de présentation pour son ordonnancement sur la table. Le
nombre idéal de plats d’un banquet est 9 ou un multiple de 9 car ce chiffre
est homophone en chinois du caractère « longévité » (jiu).
Le nombre de plats retenus est séquencé en trois services : -
Le
service des petits plats (xiao cai) -
Le
service des plats principaux (zhu cai) -
Le
service des mets sucré et des fruits frais (tian
dian). Au-delà
des trois séquences de service, la réussite d’un banquet chinois se juge
pour les convives sur son esthétisme par la mise en scène des mets et la
finesse de découpe des ingrédients, sur les sensations offertes par
l’alternance des textures issues à la fois des ingrédients et des techniques
de cuisson, sur le travail du chef de cuisine sur le goût avec la mise en
valeur des cinq saveurs de base (acide, piquant, amer, sucré et salé), sur la
présence des ingrédients prestigieux dans les plats principaux, sur
l’appellation des recettes qui prennent des intonations de bon augure. Les
gambas deviennent des « petits dragons », tandis que les premières
asperges du printemps sont baptisées « jade ». En Chine, la saveur
métaphorique des noms de recettes est parfois plus importante que la vraie
saveur elle-même ! Si
la concordance des mets et des vins est une évidence dans les repas français,
il n’existe pas un tel art dans la cuisine chinoise. Culturellement, les
Chinois estiment que la saveur de leurs plats principaux atteint déjà sa plénitude
et n’a pas besoin d’autre aide extérieur. La consommation d’alcool de céréales
traditionnel comme le moutai est réservée
exclusivement au premier service des petits plats. Il s’agit de petites mises
en bouche chaudes ou froides, avec un assortiment très large de recettes
possibles. Pour les recettes froides, cela va du simple légume saumuré ou au
vinaigre, de viande froide de porc ou de volaille, à la charcuterie, aux œufs
de cent ans, aux roulades d’omelette farcie, au tofu fumé… Dans les
banquets prestigieux, cet assortiment de recettes froides est présenté sous
forme de tableaux esthétiques de papillons (signe de bienvenu), de dragons et
de phénix (souhait de grande position sociale), de paysages avec une grue
(souhait de longévité), de poissons (souhait d’abondance)… Ces œuvres
d’art comestibles à rébus servent de « dormants » sur la table
pour impressionner déjà les convives ! Comparé à la haute cuisine française,
ces plats sculptés chinois rappellent la tradition des plats d’apparats qui
connut son apogée avec Antoine Carême, le célèbre pâtissier architecte. Ils
sont rejoints ensuite par ces recettes chaudes comme des beignets de crevettes,
des petits pâtés croustillants, des petits sautés de légumes frais de
saison, de petits bols mijotés avec une sauce liée à la fécule pour servir
d’appoint à l’alcool de céréales. Ceux qui ne boivent pas d’alcool
optent pour une bière, un jus de fruit, un soda ou un thé. Avec l’émergence
des vins français en Chine perçus comme plus prestigieux que les vins
d’autres pays ou même chinois, certains professionnels commencent à
introduire le mariage des mets chinois et des vins français sur l’ensemble du
repas. Mais ceci reste encore l’apanage d’une classe aisée. Il dénote plus
un signe pour exprimer sa position sociale plutôt que de vraies capacités
sensorielles à apprécier les vins. Le
moment le plus attendu par les invités est le second service des plats
principaux. Les pièces de viandes rôties entières comme le cochon de lait
laqué, l’oie rôti, le canard laqué ou encore l’agneau de lait rôti
figurent dans cette série (traditionnellement, le four ne faisait pas parti de
l’équipement d’une cuisine familiale), ainsi que tous les produits
aquatiques prestigieux comme la langouste, les grosses gambas, les coquilles
saint Jacques. La présence de ces produits qui viennent de l’eau est de bon
augure. Ils expriment aussi un souhait de « bon vent », de « facilité
de réussite » dans la vie et les affaires. Tous ces produits sont cuisinés
avec soin et mis en goût avec des légumes de saison, des champignons rares. Il
n’y a pas de recette type. La seule limite réside dans la créativité du
chef de cuisine. Ce que chacun espère surtout, c’est l’apparition des
« produits précieux des montagnes et des saveurs de la mer » (shanzhen haiwei) qui
offrent une texture gélatineuse si déroutante pour les palais occidentaux. Il
y a par exemple, les nids d’hirondelles, les ailerons de requin, les
holothuries de mer, les méduses, les abalones. Ces produits onéreux marquent
la bienveillance de l’amphitryon à l’égard de ses convives. La place
d’un « potage prestigieux » (nong
tang) se trouve aussi dans cette séquence. Lorsqu’il s’agit d’un
potage à base d’ailerons de requin ou d’une soupe de bénincases sculptées,
ils clôturent nécessairement la fin de ce deuxième service. Le chef prendra
soin de peu saler le bouillon pour que les convives, avec les papilles saturées
en saveur, ressentent toute sa fraîcheur. Le
dernier service comporte des mets sucrés comme la crème de graines de sésame
moulues, les potages sucrés de graines de lotus et de longanes, les tartes aux
œufs sucrés, les beignets sucrés farcies, les petits pains farcies et des
fruits frais de saison. Ceci ne signifie pas que des mets sucrés soient absents
des deux précédents services, ni qu’il n’y a aucun mets salé dans ce
service. Cette notion de service sucré et très flexible. Les nouilles ou le
riz sauté s’y retrouvent. Ces féculents cuisinés sont un piège. Les
consommer signifie que le menu du banquet n’était pas à la hauteur ! Les
tables des banquets sont de forme ronde, avec 8, 10 ou 12 convives. Dans tous
les restaurants actuels en Chine, elles sont toutes équipées d’un plateau
central rond mobile. Il préserve la disposition et l’ordonnancement des plats
pour préserver la beauté de la mise en scène des mets avant consommation tel
que le chef de cuisine l’avait imaginé. Ce service de banquet à la chinoise
rappelle le service à la française en cours en France jusqu’à la moitié du
XIXème siècle. Comme pour le banquet chinois, le repas français était composé
de plusieurs séquences de service. On en comptait jusqu’à quatre. Pour
chaque service, une série de mets était disposée de manière figée sur la
table, puis « relevée » au prochain service. Ceci signifie que
toute la série de mets du premier service était desservie dans sa totalité
pour être remplacée par une nouvelle série. Toutefois, les mets présents sur
la table à chaque service n’étaient pas accessibles à chaque convive. Ils
n’avaient pas vocation non plus à être dégustés par tous. Chaque convive
devait se contenter des mets qui lui étaient accessibles.
Le plateau tournant chinois a résolu ce problème. En tournant, chaque
plat cuisiné se positionnait nécessairement devant chacun ! C’est ainsi
que la France avait adopté le service à la russe, où les plats chauds étaient
servis les uns après les autres, présentés par du personnel de service à
chaque convive qui se servait seul. Dans
l’ordre de consommation des mets, si les Chinois alternent encore
aujourd’hui indifféremment les mets de saveurs salés et sucrés comme notre
passager chinois sur le vol d’Air France, cela demeure
toujours un étonnement pour les Français. Le repas français dissocie
ces deux saveurs en reléguant le sucré en fin de repas. Il n’en fut pas
toujours ainsi. D’après
l’historien Jean Louis Flandrin, c’était à partir du XVIIème siècle que
le sucre commença à être exclu de l’assaisonnement de tous les mets, le reléguant
ainsi des deux derniers services des repas : l’entremets et le dessert. A
la lumière des pratiques culturelles chinoises, l’ordre des mets à la française
n’est pas parlant pour un Chinois, aussi délicieux que soient les plats présentés.
Pour lui, un repas est nécessairement composé de fan
et de cai. C’est le curseur sur la quantité de féculent de base (fan)
consommée qui fait la différence entre un repas du quotidien et un repas de fête.
Cette définition de féculent de base est précise et comprend le riz, les
nouilles et le pain. Les pommes de terre si présentes dans la cuisine française
ainsi que les légumineuses, ne rentrent pas dans cette vision. J’ai même
connu des chefs chinois, invités à un repas de gala en France, qui complétèrent
leur dîner par des nouilles instantanées une fois rentrés pour être rassasiés !
Voilà une des raisons pour lesquelles au-delà des aspects économiques, de
l’usage difficile des couverts pour couper les gros morceaux de viandes, des
repas français perçus comme trop riches en viandes et en légumes, les cars de
touristes de chinois préfèrent toujours consommer une cuisine chinoise durant
leur séjour en France alors qu’il y a des possibilités d’adaptation de
l’ordre des mets à la française dans une consommation chinoise. Pour les
touristes chinois plus fortunés, quelques grands hôtels parisiens commencent déjà
à proposer des petits déjeuners typiquement chinois. Sinon ils choisissent de
séjourner dans des hôtels à ADN asiatique comme le Shangri-là ou le
Penninsula où ils seront sûrs de trouver bonheur pour leurs papilles et leur
satiété !
Comment manger comme un Pékinois ? La cuisine chinoise repose sur la différenciation fondamentale entre le fan 饭et le cai菜. Le fan désigne la nourriture de base, généralement constituée de céréales bouillies, cuites à la vapeur ou frits ; le cai désigne les plats de viande ou de légumes, appelé aussi xiafan 下饭 « ce qui fait descendre le fan », c'est-à-dire ce qui donne du goût pour exciter l’appétit. Tout repas doit constituer d’une partie de fan et d’une partie de cai. Cette distinction se manifeste à plusieurs niveaux. Les ustensiles de cuisine servant à préparer le fan sont distincts du cai. Le fan est constitué d’un seul ingrédient alors que le cai est une combinaison d’au moins deux ingrédients. Dans l’alimentation quotidienne, la portion du fan représente 80%, alors que le cai représenté 20%. Dans les repas de fêtes, ces proportions sont inversées. A Pékin, région de céréales, les pékinois préfèrent consommer du blé et du maïs plutôt que le riz. Certains pékinois disent même qu’ils n’ont pas la sensation de satiété s’ils n’ont pas consommé après un bol de riz, un peu de blé, sous forme de mantou 馒头(pain nature cuit à la vapeur), de bing饼 (grosses crêpes à base de farine de blé, farci ou non), ou mian 面(nouilles de blé). Ainsi, au petit déjeuner, les pékinois traditionnels prennent une boisson chaude sous forme de lait de soja, de thé, ou de thé au lait (héritage impérial des mandchous), accompagnés de bing, ou de youtiao 油条 (traduction : filet d’huile), beignet à base de farine de blé, ou de pain cuit à la vapeur, avec juste la farine de blé, ou de la farine de blé mélangée à la farine de maïs. Ils peuvent le compléter par un œuf dur cuit dans des feuilles de thé et de sauce de soja. Certains n’hésitent pas dès le matin à consommer une soupe de nouilles. Nous sommes plus dans une version de petit déjeuner salée que sucrée ! A l’heure du déjeuner comme celui du dîner, le fan est constitué de nouilles, de mantou de préférence, accompagné d’au moins un plat de cai et une soupe. Le riz est rarement servi. Le plat de cai peut être des légumes sautées avec très peu de viande, du fromage de soja sauté à l’ail et au piment. La soupe est faite avec quelques morceaux de navets ou de bénincases, juste mijotées avec du travers de porc et du gingembre pour avoir plus de goût. Les crudités sont très rares à l’exception des concombres ou du chou mariné à l’ail et au piment, considéré comme un cai qu’un condiment. Jusqu’à ces dernières années, la part de viande dans la ration alimentaire est très faible, représenté majoritairement par la viande de porc et de poulet, et d’abats divers (foie, cœur, rognons). Avec l’augmentation du niveau de vie, la consommation de viande tend à augmenter ainsi que leur variété. Les repas se terminent sur un fruit frais ou une tasse de thé. Les « desserts » ou « pâtisseries sucrées » sont consommés en dehors des repas principaux.
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